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Le Pénitent, Verset Premier - La Genèse



Temps de lecture : 15 minutes.

« Aime ton prochain ». « Tends la main à ceux qui en ont besoin ». « Sois bon ». Tant et tant de phrases qui n'ont de sermons que le nom. De mots désuets et ayant perdu leur sens depuis les éons, instrumentalisés puis oubliés.

Vous voyez, j'ai grandi dans une famille catholique, une vraie de vraie comme on n'en fait plus. Messe du dimanche, prière avant le repas, Carême... La totale. Mes parents n'avaient rien d'exceptionnel, je vous arrête tout de suite. Ils n'étaient pas fanatiques, ni membres d'une secte obscure pratiquant le sacrifice de chèvres. Non, c'étaient simplement de bons chrétiens, fidèles et investis, qui n'aspiraient qu'à sauver leurs âmes des griffes du Malin pour pouvoir accéder au Paradis.

Dès mon plus jeune âge, je l'ai cru, moi aussi. Que nos actions avaient cette fin, ce but. Qu'il fallait répandre le bien si nous voulions accéder à la félicité éternelle. Il faut dire que j'étais inscrit dans une école catholique pur jus, qui complétait à merveille l'éducation que mes parents avaient décidée pour moi.

J'étais heureux. Cette religion m'apportait un idéal, une raison de faire le bien. Elle donnait à mes parents la volonté de se lever le matin, d'aller travailler, d'aider leur prochain. Je me fichais bien de ce que pouvait penser autrui à mon sujet, j'aimais cette vie. Et longtemps, ça a duré. Jusqu'à ce jour de mes dix-huit ans, lorsque j'ai finalement attrapé mon courage à deux mains, et ai avoué à mes parents mon homosexualité. Après tout, Dieu n'est qu'amour, ils me l'avaient dit. Qu'est-ce que je risquais ? Eux m'accepteraient, et Lui aussi. À vrai dire, nous n'avions jamais discuté du sujet auparavant. Je savais que certains catholiques se positionnaient fondamentalement contre la chose, mais j'étais convaincu que mes parents, eux qui m'avaient élevé dans l'amour, le leur et celui du Seigneur, m'accepteraient.

J'avais tort. À un point que je n'imaginais même pas.

Lorsqu'elle a entendu ma déclaration, ma mère a marqué un temps d'arrêt, puis a fondu en larmes en joignant les mains. Mon père, lui, est resté impassible et m'a simplement demandé, le plus calmement du monde, de rejoindre ma chambre. Ma mère, d'habitude si enjouée. Mon père, d'ordinaire si chaleureux. C'étaient mes mots qui les avaient bouleversés à ce point ?

Devant le regard insistant de mon géniteur, j'ai monté les escaliers en courant, et ai à peine eu le temps de claquer la porte de la chambre derrière moi qu'un cri de rage m'est parvenu depuis le rez-de-chaussée. Je ne comprenais pas. C'était mal ? Dieu est amour. Dieu aime chacun de ses enfants de la même façon. C'est ce que mes parents, que j'admirais tant, m'avaient appris. Alors que ma vue se brouillait de larmes, je suis tombé sur mon lit, empli d'un étrange mélange d'incompréhension et de culpabilité. C'était évident, pourtant. La réponse m'apparaissait enfin, clairement. Comment avais-je pu m'imaginer une seule seconde que cette révélation allait les laisser de marbre ? Que Dieu me pardonnerait ? J'avais révélé aux deux êtres que j'admirais le plus au monde que j'étais un pécheur, une engeance du Malin.

Au comble de la douleur, mêlé entre foi et révolte, je me suis recroquevillé sur mon matelas, et ai pleuré à gros sanglots. Encore aujourd'hui, je ne saurais dire si les larmes versées ce soir-là l'étaient plus par culpabilité ou par désillusion, mais ces deux sentiments étaient bien là. Le lendemain matin, après une nuit de lamentations, mon père est entré dans ma chambre, et m'a amené à l'église. Le Père Martin, que nous connaissions bien, est rapidement venu à notre rencontre, et m'a considéré d'un œil inquisiteur. J'imagine qu'il avait dû recevoir un appel de mes parents en amont, car il semblait parfaitement au fait de la situation. Après quelques instants, il les a regardés, et s'est mis à parler de choses que je n'ai pas saisies. D'une maladie, d'une unique solution. D'une thérapie. Du fait que mes parents devraient rester discrets, que tout ceci resterait entre lui, eux, et le Seigneur.

J'étais perdu. Une thérapie ? J'étais malade ? Est-ce que c'était la volonté de Dieu ? Ma mère, les yeux humides de larmes, n'a rien répondu. C'est mon père qui a, sans l'esquisse d'un sourire, répondu au prêtre : « C'est entendu ».

À ces mots, un glas funèbre a retenti dans l'ensemble de mon crâne. J'ignorais tout de cette histoire, et pourtant, la simple entente de cette courte phrase m'avait terrifié. À ce moment, j'ai prié pour une seule chose : que Dieu me vienne en aide, qu'il m'aide à comprendre.

Mais il n'en a rien été.

Trois jours plus tard, on m'a emmené à la gare, et fait monter dans un train en partance pour un endroit inconnu, avec pour simples mots d'au revoir « c'est pour ton bien ». Alors que le wagon m'éloignait de mes parents, envahi par une peur et une incompréhension sans bornes, j'ai ri intérieurement. Le doute ne devait pas m'envahir. Je devais croire en eux, comme je croyais en Lui. Après tout, son Amour est éternel, absolu. Il me protégerait. Il ne m'arriverait rien.
Encore une fois, j'avais tort.

La suite, vous vous en doutez, a été ce que je rapprocherais le plus de l'Enfer. Je suis arrivé au camp après environ cinq heures de trajet, et ai été accueilli par un prêtre qui m'a béni. On m'a alors débarrassé de mes effets personnels, que je ne reverrais plus jamais, et guidé vers une petite chambre exigüe, aux allures de cellule. Lorsque, assis sur mon matelas, l'air hagard, j'ai fini par entrevoir la vérité que j'occultais depuis notre entrevue dans l'église avec le prêtre, j'ai compris, et j'ai accepté. Mes parents, le Père Martin, tous ces gens... Ils faisaient ça pour moi. Par amour. Pour que je puisse avoir une place là-haut, au Ciel, et vivre avec eux éternellement. Je devais accepter de guérir, pour eux, pour moi, pour Lui. Ici, je n'étais rien d'autre qu'un pénitent en quête de salut.

Mais très vite, l'utopie a fait place à une nouvelle désillusion. Un prêtre, qui s'était préalablement présenté comme étant le Père Ludwig, est venu me chercher dès le lendemain matin et m'a mené dans une petite chapelle, où j'ai remarqué d'autres jeunes d'approximativement mon âge. Il nous a tous bénis tour à tour, et nous a confié à chacun un exemplaire de ce que j'ai reconnu comme étant le livre du Lévitique. Puis, il s'est positionné sur l'autel, l'a ouvert, et s'est mis à en lire différents passages que nous devions répéter à sa suite.

« Tu ne coucheras point avec un homme comme on couche avec une femme. C’est une abomination. »

« Si un homme couche avec un homme comme on couche avec une femme, ils ont fait tous deux une chose abominable ; ils seront punis de mort : leur sang retombera sur eux. »

À mesure que nous répétions ces phrases, encore et encore, des larmes se sont mises à couler sur mes joues. Je savais être un pécheur, un impur. Je savais que je devais faire pénitence pour mériter le Ciel. Je savais tout ça. Mais ces mots, répétés inlassablement, encore et encore, m'ont fait prendre conscience d'une chose : Il avait renoncé à me donner son amour dès le moment où ce que je ressentais avait pris le pas sur ma foi, et où j'avais commis le crime de le déclamer haut et fort devant deux de Ses plus fidèles agneaux. « Je suis une abomination ». « Je ne mérite pas Son amour ». « Je mourrai dans la souffrance ». C'est ainsi que j'ai commencé à perdre pied.

Chaque jour, cette lecture du livre. Chaque jour, cette terreur, ce sentiment grandissant de m'éloigner du salut divin malgré toute ma bonne volonté. Je passais des nuits blanches à prier, j'étais le plus fervent d'entre tous, déterminé à retrouver l'amour du Seigneur, et obtenir Son pardon, ainsi que celui de mes parents. Pendant une semaine, c'est resté ainsi. Nous priions la journée, mangions dans des pièces séparées, et le soir venu, je poursuivais mes ablutions seul, dans ma chambre aux allures de prison.

Le lundi matin, après la prière et la pitance matinales, les religieux nous ont appelés à tour de rôle dans une petite pièce du rez-de-chaussée. Lorsque mon tour est venu, je me suis levé, croisant au passage le regard déboussolé de l'un des autres garçons, qui venait de sortir de la salle. J'ai décidé de ne pas y porter davantage d'attention, et ai pénétré à l'intérieur. La première chose qui m'a sauté aux yeux a été le grand écran accroché sur le mur du fond, en face duquel un fauteuil était installé. L'un des religieux me l'a indiqué, et obéissant, je suis allé m'y asseoir. Aussitôt, j'ai senti des sangles de cuir se refermer sur mes poignets et sur mes mollets. Surpris, j'ai néanmoins gardé mon calme : après tout, ils étaient là pour m'aider. Il ne m'arriverait rien, si proche de la Maison de Dieu.

Mais m'arrachant à cette pensée, le religieux a fait un signe de croix avant de baisser brutalement mon pantalon, puis ce qui se trouvait en-dessous. Saisi de malaise, j'ai tenté d'ouvrir la bouche, mais il m'a rassuré d'un sourire, avec ce fameux « c'est pour ton bien » que je connaissais maintenant parfaitement. L'écran s'est alors allumé sur... la photo d'un homme, nu. Interloqué par cette vision soudaine qui allait à l'encontre de tout ce qui nous avait été appris ici, je n'ai réalisé qu'au douloureux pincement qui en a résulté que le religieux venait d'accrocher une pince crocodile sur mon testicule droit, visiblement reliée à un générateur. L'homme a souri de plus belle, et m'a intimé de regarder l'écran. Je l'ai fait. C'était un corps musculeux, gracieux et poli. J'ai alors lentement baissé les yeux vers le symbole du vice véhiculé par cette image, un symbole tabou. Et de la bouche du prêtre, des mots ont sonné, lointains. Il a dit que je ne devais pas assimiler cette image impie à des pensées charnelles. Il a dit qu'il m'en sauverait, que je devais simplement être fort, et croire en Lui.
Puis, il a actionné le générateur.

Une intense douleur a traversé mon testicule de part en part, et m'a arraché un cri. J'ai tourné le regard vers l'homme, les larmes aux yeux, et ai rencontré le même sourire figé, sans chaleur. « Tout ira bien ». Cette phrase, encore. Elle résonnait dans mon cerveau comme une oraison funèbre, inlassablement. « Tout ce que nous faisons, nous le faisons pour toi ». Il avait raison. Je le savais, après tout. Mais alors, pourquoi ? Pourquoi était-ce si... difficile ? À nouveau, il m'a ordonné de regarder l'écran. À nouveau, j'ai obéi, avec peine.

Sur la télévision, l'image avait changé. Un autre homme, nu lui aussi, dans une position très suggestive. Je ne devais pas le contempler. Je ne devais pas aimer cette vision. Je n'en avais pas le droit. Je devais faire preuve de vertu.

Terrifiante et pesante, la voix du religieux s'est élevée de nouveau, juste à côté de mon oreille. Même si je savais ce qui allait suivre, je l'ai écouté me répéter de ne pas me laisser envahir par ces pulsions impies, de penser au Seigneur et exclusivement à Lui. J'ai fermé les yeux.

À nouveau, une décharge fulgurante m'a traversé l'entrejambe, plus intense encore que la précédente. J'avais mal. Humiliation, disgrâce... C'était donc ça, la pénitence ? Contempler l'abîme du péché en résistant suffisamment pour ne pas y plonger ? Je me sentais partir, la tête me tournait. Le religieux a alors attrapé mon crâne, m'a écarquillé les yeux, et les a braqués sur une nouvelle image, similaire aux précédentes. Ses mots, portant les accents d'un sinistre requiem, résonnent encore en moi à l'heure qu'il est, ironiquement prophétiques. « Regarde ! » « Regarde comme il est désagréable de contempler l'interdit, et souviens-toi de cette sensation ! ».

J'ai regardé, pour la troisième fois. J'ai osé apprécier l'image, pour la troisième fois. Et j'ai senti quelque chose monter entre mes cuisses, grandir en même temps que mon péché, pour la première fois depuis mon entrée dans cette pièce. Le sourire du prêtre a disparu. Après ça, je me rappelle uniquement de la douleur. Puis, le noir.

Lorsque je me suis réveillé, j'étais dans ma chambre, allongé sur mon lit. Mon entrejambe me lançait. Ma tête aussi. C'était donc ça, le prix à payer ? Le prix à payer pour avoir choisi d'être moi-même ? Non, je devais rester lucide. J'étais un pécheur. Un impie. Je devais faire pénitence, au moins pour Dieu. C'est donc en proie à ce conflit intérieur, à l'humiliation et à la douleur que je me suis endormi, ce soir-là.

Trois mois. C'est le temps que j'ai passé dans cet enfer. Des journées comme celle-ci, il y en a eu bien d'autres. Des meilleures, aussi. Des pires, parfois. On nous parlait de l'impureté de nos corps, on nous comparait à des zoophiles, des pédophiles. J'aurais trouvé ce dernier point de comparaison très ironique, si je ne manquais pas autant de jugeote, à l'époque.

Jour après jour, nuit après nuit, je me sentais flancher davantage. Je priais toujours autant, mais je doutais de plus en plus. La douleur et la peine, l'affliction et l'humiliation étaient-elles la solution ? Je ne sentais aucun changement en moi. Il n'y avait rien, sinon cette terreur persistante. J'étais roulé dans la boue, mes idéaux piétinés, mes espoirs ruinés, à chaque nouveau jour qui passait.

Peu à peu, une idée que je refoulais depuis longtemps a germé dans mon esprit brisé. Et si... Et si ces religieux se trompaient... ? L'amour... Chez eux, je n'en voyais pas trace, peu importe à quel point je m'étais leurré auparavant. Ils s'étaient perdus en chemin, de toute évidence. Leurs actions ne pouvaient être la volonté de Dieu. Moi, qui en avais conscience, je devais les aider. Les aiguiller vers la Lumière, en direction de laquelle, tous ensemble, nous marcherions afin d'expier nos fautes main dans la main. Où était passée chez eux cette notion d'amour infini, de main tendue à son prochain ? Ma mission était de leur rendre ces vertus. Je le savais, maintenant : c'était uniquement pour mener à bien cette entreprise que j'étais là. Contrairement à ce dont je m'étais convaincu pendant tout ce temps, le Seigneur ne m'avait pas rejeté : il m'avait donné une chance d'expier mes péchés, en aidant mon prochain envers et contre tout. Vers la fin du deuxième mois, je suis allé voir le Père Ludwig, après la messe. Je lui ai parlé. Je lui ai dit que je pouvais les aider à retrouver le droit chemin, que nous pouvions faire pénitence ensemble. Il n'a rien répondu à ça, et m'a intimé de sortir. J'ai obéi, une fois encore.

La nuit même, j'ai fait un rêve. Ou plutôt, j'ai eu une révélation. Le Seigneur m'a parlé. Il m'a demandé de les aider. Il m'a parlé de Sodome et Gomorrhe. Il m'a dit qu'il ne voulait pas que ça se finisse comme ça. Et il a ajouté qu'il m'aimait, d'un amour divin, éternel.

Le lendemain, je suis retourné voir le Père. Je l'ai forcé à m'écouter. Je lui ai parlé de mon rêve. Il m'a ri au nez, disant qu'un pécheur n'aurait jamais accès à aucune révélation. À ce moment, j'ai su. J'ai su que c'était lui aussi un pécheur, qui reniait l'autorité divine, et qu'il ne désirait qu'une seule chose : prendre la place du Très-Haut en nous détournant de la vraie foi. Ici-bas, nous en étions tous. Mais j'étais celui qu'Il avait choisi, et on m'enviait, ce qui était un vice impardonnable.

J'ai alors décidé de prouver ma dévotion, afin qu'ils me croient. Chaque jour, je m'infligeais une pénitence pour expier mon péché, et me rapprocher de Dieu. Alors, lorsqu'ils verraient que toute trace de vice aura quitté mon corps, ils s'inclineraient devant le messager divin, m'adoreraient comme leur sauveur, et à travers moi, le Seigneur. J'ai commencé par l'autoflagellation. Au début, c'était douloureux. Mais progressivement, mon corps s'est habitué, et j'ai fini par supporter mon châtiment. Toutefois, ce n'était pas assez. Je ne devais faire plus qu'un avec la foi, je devais être la foi. Je me suis infligé brûlures, blessures, multipliant mes allées et venues à l'infirmerie et mes absences à la messe. Ils me disaient d'arrêter. Que je ne serais pas plus proche du Très-Haut ainsi. Cette fois, c'étaient eux qui se trompaient. J'étais en train de m'administrer ma propre contrition, et ils le voyaient. Ils étaient jaloux, écœurés que quelqu'un comme moi parvienne à être si proche de Dieu et à expier ses fautes sans leur aide impie. Les murs de ma chambre étaient désormais gravés de versets de la Bible parlant de l'amour divin, du pardon et de l'absolution. Mais ça aussi, ces pseudo-religieux ne le comprenaient pas. J'avais décidé que je m'arracherais les ongles, me flagellerais et me brûlerais la peau des bras et du visage autant de fois que nécessaire. Jusqu'à ce qu'ils comprennent. Malheureusement, ils ont fini par m'interdire l'accès à toutes les pièces du camp, de peur que je ne récupère un autre objet pour accélérer mon absolution. Mes repas m'étaient fournis directement dans ma chambre, et c'était un autre prêtre que le Père Ludwig qui venait me réciter la Bible.

Qu'à cela ne tienne. Ne pouvant plus faire pénitence convenablement, j'ai gratté le sol jusqu'à m'écorcher les doigts. J'ai frappé ma tête contre le mur de pierre froide jusqu'à ce que la douleur m'assomme. Je devais poursuivre, quoi qu'il m'en coûtait. Et finalement, j'ai eu un deuxième et dernier rêve. Je l'ai vu de nouveau, Lui et son amour, l'amour qu'il a pour moi. Lorsque je me suis réveillé, j'ai su ce que je devais faire.

Les pécheurs refusaient d'entendre raison. Ils refusaient de reconnaître qu'ils s'étaient éloignés de l'amour de Dieu. Ce n'est pas ma faute. Je n'ai fait qu'exécuter Sa volonté en punissant ceux qui par trois fois ont renié Son nom. Il ne voulait pas en arriver là, Il m'avait prévenu lors de ma première révélation. Ils l'y ont forcé. Alors, j'ai purifié leurs âmes, par amour. J'ai attisé le brasier de l'absolution de mes mains calcinées par la pénitence, et tout est parti en fumée. Il m'a suffi de suivre la voie du Seigneur en faisant jaillir de ce vieux radiateur les flammes de la salvation. Les pécheurs, religieux comme camarades, ont disparu en même temps que leurs vices. J'ai versé un torrent de larmes, lorsque tout s'est terminé. J'avais sauvé leurs âmes et les avais à jamais délivrés du vice. Notre Père, qui est aux cieux, m'a confié une mission que je ne pouvais mener à bien que par la purification, comme lui l'a fait avec le Déluge. Tout aurait pu se passer dans la paix, s'ils avaient écouté la véritable voix du divin. Mais la fin est la même : mon amour les a sauvés.

Les flammes se sont écartées sur mon passage alors que je sortais du bâtiment pour contempler les étoiles, et j'ai vu l'astre polaire, sur la voûte céleste, briller pour moi. Alors, je suis tombé à genoux devant la Grâce, dos à mon œuvre, et ai pleuré. J'ai pleuré pour leurs âmes lavées du péché, qui allaient enfin trouver le repos, et pour la volonté divine qui avait fait de moi son bras armé, qu'elle protégerait éternellement. L'amour... C'est ce qui me guide, et me guidera toujours.


                                                                                                                   ***

Derrière les barreaux me séparant de lui, le prisonnier, qui venait d'achever son récit, s'était mis à pleurer. J'étais mal à l'aise. Je ne savais pas si je devais m'en aller sans rien dire, ou ajouter quelque chose. Après tout, on n'était même pas censés discuter autant. Ça faisait maintenant trois jours que j'avais été muté dans ce pénitencier, et dès le premier, mes nouveaux collègues m'avaient causé de ce type. Un fanatique, un cinglé, qui avait été condamné à la perpétuité plutôt qu'à l'asile à cause la pression de l'Église, qui refusait que quelqu'un ayant massacré autant de religieux goûte à autre chose qu'à la prison. Je les comprenais, quelque part.

Mais conscient que j'avais trop traîné à écouter les divagations d'un fou et que je devais reprendre ma ronde, j'ai décidé de repartir silencieusement en le laissant à ses sanglots.
Alors que je m'éloignais, sa voix m'a hélé une dernière fois. Et à ma grande surprise, elle n'était teintée ni de peine, ni de tristesse, mais d'une joie absolue. Une joie glaçante.

– Puissiez-vous baigner à jamais dans le véritable amour du divin, mon frère. Pardonnez aux pécheurs comme Il nous pardonne nos fautes, et sauvez-les du vice. Vous aussi, vivez dans la Lumière. Venez donc prier avec moi, lorsque vous le pourrez. J'ai apprécié votre compagnie. À présent, soyez béni, et allez en paix.

Les dents serrées, j'ai attrapé dans mon poing la croix que je portais autour du cou pour la glisser sous mon uniforme, et sans me retourner, me suis éloigné de la cellule.

Ce texte a été réalisé par Gordjack et constitue sa propriété. Toute réutilisation, à des fins commerciales ou non, est proscrite sans son accord. Vous pouvez le contacter sur nos plateformes, nous tâcherons de vous y aider si besoin. L'équipe du Nécronomorial remercie également Wasite, Jared Gauss qui ont participé au processus d'analyse et de sélection conformément à la ligne éditoriale, et Noname qui s'est chargée de la correction et la mise en forme.

6 commentaires:

  1. Encore de la propagande gaucho lgbt, gardez ça pour les réseaux sociaux et laisser ce site tranquille, merci.

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    1. Je n'arrive pas à savoir si tu fais de l'ironie ou si tu es réellement passé à côté du texte, et du véritable "message" qu'il véhicule ?

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    2. Encore la ce boulet ?...

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    3. Je ne vois pas trop en quoi évoquer parfois le thème de l'homosexualité est de la propagande gaucho lgbt, surtout que c'est dans le cadre d'une creepy effrayante

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  2. Ce récit est véritablement glaçant et émouvant. Particulièrement lorsque l'on sait que certains éléments sont inspirés de faits bien réels, dont les fameuses "thérapies de conversion"...

    Merci à l'auteur pour ce texte, dont l'aspect horrifique est bien travaillé mais aussi pour son message que je comprends ainsi: "Soyez toujours qui vous êtes selon votre ressenti perso, avec vos particularités qui font de vous un être unique. Personne ne devrait porter atteinte à votre vie privée tant que celle-ci n'empiète pas sur la vie d'autrui; cela s'appelle simplement le respect de chacun"

    Après pour tout le reste, ce n'est qu'une question de débat (avec un minimum d'arguments SVP) tant que la liberté d'expression et d'être de chacun est respecté. Pour en revenir à cette histoire, la détresse du protagoniste qui sombre progressivement dans la folie m'a sincèrement ému, sachant que je suis comme lui.

    Perso je remercie le destin ou le hasard (quoique ce puisse être) d'avoir eu la chance de grandir avec une famille compréhensive qui souhaite mon bonheur tel que je suis. On use beaucoup du mot "Amour" avec un sens polysémique, mais essayez de reconnaître le (les) véritable(s), Fenris.

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