Comment tuer un monstre ?

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« Ben ? Qu’est-ce que tu fais là-dedans ? »

J'ai jeté un bref coup d'œil à la porte, ma femme se tenant de l'autre côté.

« J’en ai juste pour une minute. » 

Il était inutile de répondre à sa question. Elle savait ce que je faisais, j'en étais sûr. Et elle n'aimait pas ça. Elle ne comprenait pas. Elle voulait que je passe à autre chose.

Mes yeux ont glissé vers mon téléphone et sont restés rivés sur l'écran pendant quatre minutes de plus. J'avais parcouru le Web pendant des mois à la recherche d'informations sur le procès, mais tout ce que j'avais pu trouver, c'était cet extrait de six minutes qui avait été diffusé dans l'émission ‘A Current Affair’. J'avais vu la vidéo tellement de fois que je connaissais chaque détail de chaque seconde par cœur. Mais je l'ai quand même regardée à nouveau. Parce que j'avais besoin d’une réponse.

La caméra était à ce moment focalisée sur le jury. Ils étaient tous penchés en avant et se concentraient sur le témoignage de l'expert médico-légal. La caméra s’est ensuite tournée vers la barre des témoins où le Dr Felmore parlait de la décomposition du corps d'Andrew et de l'état dans lequel il se trouvait lorsqu'il a été découvert par un promeneur de chiens en mai dernier.

Felmore s'est ensuite dirigé vers le rétroprojecteur, a tapoté une pile de diapositives sur la table pour les redresser, puis a sélectionné celle du haut et l'a placée sur le projecteur. Une photo du corps d'Andrew s’est affichée à l'écran, et toute la salle d'audience a été stupéfaite. Ils avaient brouillé les photos, mais je me souvenais de ce qu'elles contenaient. Ils avaient raison d'être horrifiés. Entendre un expert parler de façon monotone de l'abus d'un enfant de cinq ans était très différent d’en voir les effets de ses propres yeux.

Le médecin a expliqué les diapositives sans émotion, en soulignant les innombrables abrasions, contusions et fractures ouvertes. Il a parlé de la manière dont il avait été tué – la strangulation – et a montré à la cour comment les empreintes de mains sur le cou d'Andrew correspondaient parfaitement à celles de l'accusé. Puis il a éteint le projecteur et a commencé à parler de l'heure présumée de la mort.

La caméra s'est détournée à ce moment-là pour montrer ma famille, qui pleurait en silence.

Et puis, finalement, elle a fait un tour sur la table de l'accusé. Le garçon assis à côté de son avocat avait carrément l'air de… s'ennuyer. Il faisait tournoyer un crayon d'avant en arrière entre ses doigts et poussait de grands soupirs, à quelques secondes d’intervalle. C'était… c'était le monstre que je voulais tuer. Il avait dû sentir que la caméra était maintenant sur lui, parce qu'il s'est soudainement tourné vers elle, l'a fixée et a souri. C'était un sourire suffisant et intelligent. Comme s'il n'avait pas peur des conséquences. Comme s'il croyait que tout ça en avait valu la peine.

Au bout du compte, il avait eu raison. Il avait été condamné à être incarcéré jusqu'à sa majorité, puis sept ans de plus après cela. Ce n'était rien. C'était moins que rien.

J'ai regardé le coupe-chou que j'avais supplié ma femme de m'offrir pour mon anniversaire. Comment tuer un monstre ? C'était la réponse. Ce serait si facile. Mais pouvais-je me résoudre à le faire ? Mon petit frère méritait la vengeance, même si elle venait seize ans plus tard. Andrew avait subi des horreurs qu'aucun humain n’aurait dû endurer. Pendant plusieurs jours.

J'ai regardé le petit écran et les dernières secondes de la vidéo. Le garçon s'était assis au garde-à-vous, alors que certains des dispositifs de torture de fortune qu'il avait créés avaient été sortis et placés sur une table près du jury. Ma famille a été escortée hors de la salle d'audience et ‘A Current Affair’ a coupé la vidéo. Mais peu importe, je me souvenais de ce qui s’était passé ensuite.

Le détective avait brandi chacun des appareils pour que le jury les examine et je m'étais balancé d'avant en arrière sur mon siège, étourdi de fierté devant mes créations.

Valérie a encore frappé : « Ben, tu viens te coucher ? »

Mais je réfléchissais à une question bien plus importante, la seule qui comptait. En vérité, je savais comment tuer un monstre. J'ai jeté un coup d’œil à la lame tranchante sur le lavabo. Cette partie-là était facile. Mais le problème était plus complexe que ça. Car comment tuer un monstre, quand il est en vous ?

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Ce texte a initialement été réalisé par Rebecca Klingel sur creepypasta.com, et constitue sa propriété. Toute réutilisation, à des fins commerciales ou non, est proscrite sans son accord. Vous pouvez tenter de le contacter via le lien de sa création. L'équipe du Nécronomorial remercie également Miss_Cobra qui a assuré sa traduction de l'anglais vers le français à partir de l'originale, Dan Torrance et Orizy qui ont participé au processus d'analyse et de sélection conformément à la ligne éditoriale, et Litanie et Antinotice qui se sont chargés de la correction et la mise en forme.