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Par-dessus les tertres et à travers les marais
L’homme à la bougie fait son chemin
Jusqu’à la porte de ton foyer.
Il allume sa bougie et s’approche de ton lit
Pose son cierge à la fenêtre
Voilà la comptine que ma grand-mère me chantait quand j’étais petit. Je me souviens que cette petite chanson me terrifiait au point que je me réfugiais sous ma couette, trop effrayé pour m’endormir, dans son petit chalet à la campagne. Elle décrivait le personnage comme étant un homme pâle et grand, portant un peignoir et qui aimait tuer les petits enfants. « Et à chaque fois qu’il tue, disait ma grand-mère en chuchotant, il laisse une bougie fantomatique sur le bord de la fenêtre, » finissant la phrase en hurlant soudainement, me faisant sursauter à chaque fois alors qu’elle explosait de rire. L’homme à la bougie, même le nom suffit à me donner des frissons. C’est vraiment quelque chose de terrible à raconter à un enfant, mais après tout, Mamie était terrifiante. Elle était petite et avait la peau couverte de taches ainsi que des yeux profonds et cruels qui semblaient toujours me surveiller. Après le décès de Papy, elle ne quittait plus que très rarement la maison, tant elle préférait s’asseoir sur sa chaise à bascule, me racontant des histoires sur l’homme à la bougie et se délectant de ma peur en rigolant frénétiquement quand je sursautais. C’était une dame exécrable.
Quoi qu’il en soit, en grandissant, j’ai compris que ce n’était pas entièrement de sa faute. La mort de Papy l’avait vraiment bouleversée, elle en avait perdu la tête. Elle ne pouvait plus faire la part des choses entre ce qui était approprié et ce qui ne l’était pas. Du vivant de Papy, je n’étais qu’un bébé et de fait, je ne l’avais jamais vraiment connu, mais j’ai appris plus tard à quel point il était une personne importante pour Mamie. Son départ l’avait complètement brisée. Elle est décédée alors que j’avais treize ans, et on peut dire que ça n’a pas vraiment été un choc, en considérant à quel point elle était vieille et fragile.
Me voilà maintenant âgé de trente ans. Je suis marié et père d’une petite fille, nous vivons dans un confortable logis en banlieue. Je ne pourrais être plus heureux. Il y a tout de même une chose qui m’a bousculé, récemment. C’était quelque chose d’idiot, mais ça m’a vraiment terrifié. Un cauchemar. C’était un rêve dans lequel j'étais dans ma chambre, confortablement installé dans mon lit, quand j’ai entendu une musique provenant du piano d’en bas. J’ai directement su de quoi il s’agissait : l’homme à la bougie. La chair de poule envahissait mes bras et mon cou, et j’avais la sensation que de la glace remplissait mon estomac. J’ai descendu les étroits escaliers en courant, me dirigeant vers le salon, où j’ai vu une silhouette pâle et élancée dans un peignoir, tenant un cierge, qui sortait par la porte restée ouverte. L’homme à la bougie. Il atteignait presque les deux mètres et avait de petits yeux brillants, complètement inanimés, mais aussi un sourire large et malicieux. Je me suis réveillé d’un coup dans ma sueur froide, j’ai allumé la lumière et j’ai lu jusqu’à retrouver le sommeil. J’ai imputé ce mauvais rêve à l’arrivée imminente d’Halloween, mais ça n’empêche que ça m’a bien fait flipper.
Et tout ça nous mène à hier, le soir d’Halloween. Je revenais péniblement d’une soirée, sobre – je ne bois pas - mais presque éméché par la fatigue, tant j'étais lessivé. J’enfonçais mes mains dans mes poches pour les réchauffer. Alors que je marchais à travers le craquement des feuilles orange sur le sol, la comptine de l’homme à la bougie a fait une réapparition dans ma tête. Mon cœur a commencé à battre plus fort alors que je passais dans une rue faiblement éclairée, les feuilles crépitant sous mes pieds et la lune imprimant de longues ombres sur le chemin. Dans mon esprit, je pouvais visualiser l’homme à la bougie, fin et spectral, courant vers moi et me coupant la tête d’un simple mouvement de hache. C’est ridicule, je sais, mais l’ombre peut déchaîner mon imagination, parfois. Quand je suis enfin arrivé dans ma rue, j’ai réussi à me calmer. Je me suis senti idiot d’avoir paniqué à cause de ce poème. Sous les lampadaires, j’étais en sécurité.
Arrivé à l’entrée de mon jardin, j’ai remarqué un grand homme en peignoir au bout de la rue, son visage caché par la nuit. Il semblait me regarder avec insistance. Encore une fois, des images de l’homme à la bougie ont envahi mon esprit, emballant complètement mon cœur. J’ai secoué la tête. « C’est juste un homme grand qui fait un tour pour Halloween, aucune raison d’avoir peur, » me suis-je rassuré, tentant de ralentir ma respiration. J’ai ensuite tourné la tête vers ma maison, quand j’ai entendu un rire démoniaque venant de la direction du passant. Une stalactite de terreur m’a frappé au torse. Au loin, sur le rebord de la fenêtre de ma fille, vacillait une bougie.
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J'aime bien, c'est suffisamment court pour ne pas être ennuyant.
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