Ce soir-là, je me suis retrouvée sur la route d’une façon assez stupide. Il faisait déjà nuit et une pluie torrentielle s’abattait sur la route, un début de tempête qui avait été annoncée par la météo. On n’y voyait pas grand chose à vrai dire, à peine à dix mètres, et cela relevait de l’inconscience que de conduire dans ces conditions. Mais je n’en avais pas eu grand chose à faire sur le moment : ma grand-mère venait de mourir, et dans ses derniers instants, elle m’avait reparlé du chat. Ne suis pas le chat. Elle était complètement désorientée, ce chat était mort depuis des années renversé sur la route en bas de chez elle, mais j’ai tout de suite su ce qu’elle voulait dire.
J’ai grandi avec ma petite sœur chez ma grand-mère. Nos parents avaient des postes importants dans des entreprises internationales et ils n’étaient que rarement là.
Elle vivait dans une grande maison de campagne au bord de l’Oise, un petit peu loin de tout. Avant l’arrivée de Benjamin, nous étions les seuls enfants du coin, et ma sœur et moi étions donc toujours fourrées ensemble, à lire côte à côte ou à jouer dans le bois voisin. Bref, nous nous serrions les coudes comme deux enfants seuls et qui se sentent un peu abandonnés le feraient.
Nous dormions dans la même chambre sous les combles, une grande pièce toute mansardée aux murs tendus de papier peint bleu auxquels nous avions punaisé des dessins et des photographies. Ma grand-mère nous avait installé des bureaux sur le palier attenant pour que nous puissions travailler. Il y avait aussi une lourde armoire contre un des murs et, à côté, placée tout contre, une banquette. Et, sur cette banquette, se trouvait souvent le chat.
C’était un chat de gouttière gris tigré, un bon vieux matou baroudeur tout en muscles gagnés à poursuivre les rats des champs. Il se retrouvait souvent compagnon infortuné et involontaire de nos jeux, et il désertait en se repliant dans quelque endroit où nous ne parvenions pas à le trouver. Un jour que je le poursuivais dans la maison, il s’était élancé dans les escaliers, moi à sa suite, avait déboulé sur le palier et foncé sous la banquette. Je m’étais allongée sur le sol, m’étais glissée tant bien que mal sous le meuble, avais tendu le bras en tâtonnant et, là où aurait dû se trouver le mur, ma main n’avait rencontré que le vide.
Je n’ai pas trouvé le chat.
Lorsque j’ai rapporté la chose à ma grand-mère, elle m’a dit qu’il s’agissait là de mon imagination débordante d’enfant de dix ans, et que je ferais mieux de ficher la paix à cette pauvre bête. Quelques jours plus tard, Benjamin emménageait chez sa tante, une vieille chouette qu’on ne voyait que très rarement. Pour ma sœur et moi, ce fut un rayon de soleil dans nos vies. Il avait à peu près notre âge et la nouveauté que représentait ce nouveau compagnon de jeu bientôt inséparable m’a tiré temporairement toute cette histoire de la tête.
Cependant, cette histoire est revenue périodiquement occuper mes pensées, presque de plus en plus lancinante avec l’âge. J’y avais souvent songé, en contemplant le chat dormir. Le mur n’avait pas pu avoir disparu, je l’admettais bien. Mais où était passé le chat ce jour-là ?
Puis, comme toujours, je finissais par retourner à mes occupations.
Ce n’était que des élucubrations d’une enfant qui se sentait seule.
Alors pourquoi, dans son ultime soupir, ma grand-mère m’avait-elle soufflé au creux de l’oreille, tout doucement, la voix tremblante comme si elle craignait qu’on ne l’entende, « Ne suis pas le chat » ?
Je ne saurais expliquer l’effet que cela m'a fait, la réaction que j’ai eue par la suite. Mais de sentir sa main se crisper sur la mienne, sa voix mourir sur ces dernières paroles, puis ses doigts se relâcher doucement... Comme un grand froid jusqu’au fond des tripes.
J’ai saisi mes clefs, j’ai quitté l’hôpital et, malgré l’alerte orange aux forte pluies, malgré ma sœur me criant en désespoir de cause d’attendre que Benjamin soit de retour pour que je n’y aille pas seule, je suis montée dans ma voiture et j’ai roulé en direction de la maison où j’avais grandi. C’était complètement idiot bien sur, j’étais passée sur ce palier tous les jours pendant des années, qu’espérais-je y trouver ? Mais il fallait que j’aille voir, aussi stupide que cela soit. Et il fallait que j’y aille immédiatement.
Ce qui n’était vraiment pas une bonne idée, je m’en rendais bien compte à présent.
Sur les derniers kilomètres, la pluie a redoublé sur mon pare-brise, déversant de véritables seaux d’eau. Ralentissant, j’ai plissé les yeux pour tenter de discerner les contours de la route dans mes phares. On y voyait tellement mal que j’ai failli dépasser la maison.
Je me suis débattue quelques instants sous la pluie avec les clefs, puis je suis entrée et j’ai refermé derrière moi. Un essai à l’interrupteur du hall m’a confirmé qu'il n’y avait plus de courant. C’était fréquent dans le coin en cas de tempête et ce n’était pas bien grave. J’avais grandi dans cette maison et je n’avais pas de mal à m’y orienter, même dans l’obscurité la plus complète. J’ai farfouillé en tâtonnant dans la commode de l’entrée à la recherche de la torche que l’on y rangeait en prévision de ce genre de situations.
En l’allumant, j’ai éclairé l’horloge au mur. 21h30. Vu l’heure, et surtout vu le temps, j’étais bonne pour passer la nuit là.
En projetant le faisceau de la lampe loin devant moi, je me suis avancée dans le couloir s’enfonçant dans la maison. Ma grand-mère avait monté une étagère tout du long où trônaient des cadres photos. Un cliché de mes fiançailles avec Benjamin se trouvait dans un coin, submergé par d’autres où nous étions plus jeunes, ma sœur à nos côtés.
Je suis passée devant la bibliothèque, puis un cagibi, un bureau et, enfin, les escaliers menant à notre ancienne chambre. Ils montaient raides en prenant un virage et s’enfonçaient dans la pénombre. Je suis restée au pied quelques instants, à les éclairer sans rien faire d’autre que les regarder. Puis, quand je me suis finalement décidée à les gravir, en m’y engageant marche après marche, une main sur le mur pour m’assurer et l’obscurité refermant son étreinte derrière moi, je pouvais presque voir le chat courir devant moi comme cela avait été le cas il y a toutes ces années, le chat et ses yeux jaunes.
Jaunes ? Le chat n’a jamais eu les yeux jaunes.
L’armoire était toujours contre le mur du palier. La banquette qui se trouvait à côté d’elle avait cependant disparu, nous nous en étions débarrassés cinq ans plus tôt. En balayant le meuble de la lampe, je me suis approchée pour mieux l’observer, sans avoir trop idée de ce que je cherchais exactement.
Le chat avait couru se cacher. Je m’étais penchée pour l’attraper, avais vu le recoin sous la banquette et m’y étais faufilée à plat ventre, le parquet glissant sur ma peau, bras en avant pour l’atteindre et alors…
Quelque chose m’avait violemment saisi la main et avait tiré.
J’ai eu un long frémissement et je me suis immédiatement reculée.
Quelle idiote. Avait-on idée de se monter la tête avec des idées pareilles ? Il n’y avait jamais eu ici qu’une armoire, et autrefois une banquette, rien de plus. Il ne pouvait pas y avoir eu quelque chose de plus. C’était impossible.
Vorace.
Deux pupilles jaunes dans le noir.
Ça avait été vorace.
J’ai éclairé une dernière fois le pourtour de l’armoire de ma torche. Il n’y avait rien, bien évidemment. Juste le mur. Qu’aurait-il pu y avoir d’autre ?
Mais les poils de ma nuque étaient hérissés d’un frisson désagréable et j’avais soudain particulièrement conscience du vide sombre dans mon dos.
Je suis passée dans la chambre où j’ai posé mes affaires sur le lit. Je les ai regardées, immobile, sans esquisser un geste.
Je ne parvenais pas à penser à autre chose qu’au palier de l’autre côté du mur. Au palier et à l’armoire. À ce sentiment que je percevais comme à travers une brume, une tension, telle une faim, une faim terrible qui...
Bon, ce n’est pas bien grave, me suis-je dis, tu vas descendre au rez-de-chaussée dormir sur le canapé du salon.
Je suis sortie précautionneusement de la chambre, comme pour ne pas faire de bruit. Ne pas faire de bruit pour quoi faire ?
Je percevais comme un tiraillement au fond de mes entrailles, comme un raclement de doigts fouillant, retournant les viscères et qui, en touchant la panse, crissaient, crissaient...
Cette tempête n’était pas si terrible. Peut-être pouvais-je reprendre la voiture et repartir tout de suite.
J’ai commencé à me diriger lentement vers l’escalier, sans jamais tourner le dos à l’armoire. Et à chaque pas le tiraillement augmentait, les doigts resserraient leur étreinte.
Ils étaient verts. Les yeux du chat. Ils étaient verts.
Lorsqu’enfin j’ai buté contre la rambarde, une main m’a saisi le bras et j’ai poussé un hurlement.
J’ai grandi avec ma petite sœur chez ma grand-mère. Nos parents avaient des postes importants dans des entreprises internationales et ils n’étaient que rarement là.
Elle vivait dans une grande maison de campagne au bord de l’Oise, un petit peu loin de tout. Avant l’arrivée de Benjamin, nous étions les seuls enfants du coin, et ma sœur et moi étions donc toujours fourrées ensemble, à lire côte à côte ou à jouer dans le bois voisin. Bref, nous nous serrions les coudes comme deux enfants seuls et qui se sentent un peu abandonnés le feraient.
Nous dormions dans la même chambre sous les combles, une grande pièce toute mansardée aux murs tendus de papier peint bleu auxquels nous avions punaisé des dessins et des photographies. Ma grand-mère nous avait installé des bureaux sur le palier attenant pour que nous puissions travailler. Il y avait aussi une lourde armoire contre un des murs et, à côté, placée tout contre, une banquette. Et, sur cette banquette, se trouvait souvent le chat.
C’était un chat de gouttière gris tigré, un bon vieux matou baroudeur tout en muscles gagnés à poursuivre les rats des champs. Il se retrouvait souvent compagnon infortuné et involontaire de nos jeux, et il désertait en se repliant dans quelque endroit où nous ne parvenions pas à le trouver. Un jour que je le poursuivais dans la maison, il s’était élancé dans les escaliers, moi à sa suite, avait déboulé sur le palier et foncé sous la banquette. Je m’étais allongée sur le sol, m’étais glissée tant bien que mal sous le meuble, avais tendu le bras en tâtonnant et, là où aurait dû se trouver le mur, ma main n’avait rencontré que le vide.
Je n’ai pas trouvé le chat.
Lorsque j’ai rapporté la chose à ma grand-mère, elle m’a dit qu’il s’agissait là de mon imagination débordante d’enfant de dix ans, et que je ferais mieux de ficher la paix à cette pauvre bête. Quelques jours plus tard, Benjamin emménageait chez sa tante, une vieille chouette qu’on ne voyait que très rarement. Pour ma sœur et moi, ce fut un rayon de soleil dans nos vies. Il avait à peu près notre âge et la nouveauté que représentait ce nouveau compagnon de jeu bientôt inséparable m’a tiré temporairement toute cette histoire de la tête.
Cependant, cette histoire est revenue périodiquement occuper mes pensées, presque de plus en plus lancinante avec l’âge. J’y avais souvent songé, en contemplant le chat dormir. Le mur n’avait pas pu avoir disparu, je l’admettais bien. Mais où était passé le chat ce jour-là ?
Puis, comme toujours, je finissais par retourner à mes occupations.
Ce n’était que des élucubrations d’une enfant qui se sentait seule.
Alors pourquoi, dans son ultime soupir, ma grand-mère m’avait-elle soufflé au creux de l’oreille, tout doucement, la voix tremblante comme si elle craignait qu’on ne l’entende, « Ne suis pas le chat » ?
Je ne saurais expliquer l’effet que cela m'a fait, la réaction que j’ai eue par la suite. Mais de sentir sa main se crisper sur la mienne, sa voix mourir sur ces dernières paroles, puis ses doigts se relâcher doucement... Comme un grand froid jusqu’au fond des tripes.
J’ai saisi mes clefs, j’ai quitté l’hôpital et, malgré l’alerte orange aux forte pluies, malgré ma sœur me criant en désespoir de cause d’attendre que Benjamin soit de retour pour que je n’y aille pas seule, je suis montée dans ma voiture et j’ai roulé en direction de la maison où j’avais grandi. C’était complètement idiot bien sur, j’étais passée sur ce palier tous les jours pendant des années, qu’espérais-je y trouver ? Mais il fallait que j’aille voir, aussi stupide que cela soit. Et il fallait que j’y aille immédiatement.
Ce qui n’était vraiment pas une bonne idée, je m’en rendais bien compte à présent.
Sur les derniers kilomètres, la pluie a redoublé sur mon pare-brise, déversant de véritables seaux d’eau. Ralentissant, j’ai plissé les yeux pour tenter de discerner les contours de la route dans mes phares. On y voyait tellement mal que j’ai failli dépasser la maison.
Je me suis débattue quelques instants sous la pluie avec les clefs, puis je suis entrée et j’ai refermé derrière moi. Un essai à l’interrupteur du hall m’a confirmé qu'il n’y avait plus de courant. C’était fréquent dans le coin en cas de tempête et ce n’était pas bien grave. J’avais grandi dans cette maison et je n’avais pas de mal à m’y orienter, même dans l’obscurité la plus complète. J’ai farfouillé en tâtonnant dans la commode de l’entrée à la recherche de la torche que l’on y rangeait en prévision de ce genre de situations.
En l’allumant, j’ai éclairé l’horloge au mur. 21h30. Vu l’heure, et surtout vu le temps, j’étais bonne pour passer la nuit là.
En projetant le faisceau de la lampe loin devant moi, je me suis avancée dans le couloir s’enfonçant dans la maison. Ma grand-mère avait monté une étagère tout du long où trônaient des cadres photos. Un cliché de mes fiançailles avec Benjamin se trouvait dans un coin, submergé par d’autres où nous étions plus jeunes, ma sœur à nos côtés.
Je suis passée devant la bibliothèque, puis un cagibi, un bureau et, enfin, les escaliers menant à notre ancienne chambre. Ils montaient raides en prenant un virage et s’enfonçaient dans la pénombre. Je suis restée au pied quelques instants, à les éclairer sans rien faire d’autre que les regarder. Puis, quand je me suis finalement décidée à les gravir, en m’y engageant marche après marche, une main sur le mur pour m’assurer et l’obscurité refermant son étreinte derrière moi, je pouvais presque voir le chat courir devant moi comme cela avait été le cas il y a toutes ces années, le chat et ses yeux jaunes.
Jaunes ? Le chat n’a jamais eu les yeux jaunes.
L’armoire était toujours contre le mur du palier. La banquette qui se trouvait à côté d’elle avait cependant disparu, nous nous en étions débarrassés cinq ans plus tôt. En balayant le meuble de la lampe, je me suis approchée pour mieux l’observer, sans avoir trop idée de ce que je cherchais exactement.
Le chat avait couru se cacher. Je m’étais penchée pour l’attraper, avais vu le recoin sous la banquette et m’y étais faufilée à plat ventre, le parquet glissant sur ma peau, bras en avant pour l’atteindre et alors…
Quelque chose m’avait violemment saisi la main et avait tiré.
J’ai eu un long frémissement et je me suis immédiatement reculée.
Quelle idiote. Avait-on idée de se monter la tête avec des idées pareilles ? Il n’y avait jamais eu ici qu’une armoire, et autrefois une banquette, rien de plus. Il ne pouvait pas y avoir eu quelque chose de plus. C’était impossible.
Vorace.
Deux pupilles jaunes dans le noir.
Ça avait été vorace.
J’ai éclairé une dernière fois le pourtour de l’armoire de ma torche. Il n’y avait rien, bien évidemment. Juste le mur. Qu’aurait-il pu y avoir d’autre ?
Mais les poils de ma nuque étaient hérissés d’un frisson désagréable et j’avais soudain particulièrement conscience du vide sombre dans mon dos.
Je suis passée dans la chambre où j’ai posé mes affaires sur le lit. Je les ai regardées, immobile, sans esquisser un geste.
Je ne parvenais pas à penser à autre chose qu’au palier de l’autre côté du mur. Au palier et à l’armoire. À ce sentiment que je percevais comme à travers une brume, une tension, telle une faim, une faim terrible qui...
Bon, ce n’est pas bien grave, me suis-je dis, tu vas descendre au rez-de-chaussée dormir sur le canapé du salon.
Je suis sortie précautionneusement de la chambre, comme pour ne pas faire de bruit. Ne pas faire de bruit pour quoi faire ?
Je percevais comme un tiraillement au fond de mes entrailles, comme un raclement de doigts fouillant, retournant les viscères et qui, en touchant la panse, crissaient, crissaient...
Cette tempête n’était pas si terrible. Peut-être pouvais-je reprendre la voiture et repartir tout de suite.
J’ai commencé à me diriger lentement vers l’escalier, sans jamais tourner le dos à l’armoire. Et à chaque pas le tiraillement augmentait, les doigts resserraient leur étreinte.
Ils étaient verts. Les yeux du chat. Ils étaient verts.
Lorsqu’enfin j’ai buté contre la rambarde, une main m’a saisi le bras et j’ai poussé un hurlement.
« Mais qu’est-ce que tu fiches ? »
J’ai immédiatement reconnu la voix et j’ai pris une inspiration tremblante, le cœur battant à tout rompre. Dans le faisceau de la lampe, Benjamin avait lui-même reculé sous mon cri. Il avait levé les deux mains comme pour m’apaiser.
« Comment est-ce que tu es entré ? » ai-je demandé en reculant.
Je n’ai pas reconnu le ton de ma propre voix.
Benjamin a écarquillé les yeux. Puis il a fouillé dans ses poches pour en tirer un trousseau.
« Ta sœur m’a passé ses clefs. Elle se fait beaucoup de soucis pour toi, tu sais. »
Et à son air inquiet posé sur moi, j’ai deviné que du souci, il s’en faisait aussi.
Il faut dire qu’ainsi, dans le noir, la posture défiante, les doigts crispés sur ma torche et la respiration rauque, je devais avoir l’air d’une démente.
Benjamin a reposé sa main sur mon bras.
« Eh… Tout va bien ? »
Je n’ai pas répondu et j’ai laissé mon regard s’égarer de nouveau vers l’armoire.
Une bourrasque particulièrement violente a fait craquer les poutres et Benjamin a resserré sa prise sur moi. Sans doute la pénombre ambiante, la pluie battant les carreaux et le vent hurlant ne faisaient rien pour le rassurer.
« Viens, m’a-t-il pressé, descendons. Je vais allumer un feu dans la cheminée du salon. Ça nous fera de la lumière. »
Benjamin m’a entraînée à sa suite au-rez-de-chaussée, puis m’a fait m’asseoir dans le canapé du salon. Il a entassé quelques bûches dans la cheminée et tâché d’allumer un feu. Je le regardais machinalement faire, les yeux dans le vague, et je pensais toujours au chat, ce chat mort depuis des années.
« Je suis désolé pour ta grand-mère. »
Il attisait le feu dos à moi. J’ai soudain éprouvé une bouffée de culpabilité en songeant à ma sœur, que j’avais laissée seule et désemparée à l’hôpital. Je n’en revenais alors pas moi même de m’être laissé monter la tête ainsi.
« Qu’est-ce que tu faisais là haut ? » m’a alors demandé Benjamin d’une voix douce.
Je n’ai rien répondu. Benjamin a soupiré mais n’a pas insisté. Le feu bien pris, il s’est assis à côté de moi, a ramené un plaid sur nous et m’a attiré contre lui.
Et, alors - enfin -, des heures après le décès de ma grand mère, je me suis mise à pleurer.
Le soleil nous a réveillés au matin. Benjamin s’est dégagé précautionneusement, m’a embrassée sur le front et est parti se doucher. Je suis restée quelques instants à observer les braises mourantes dans l'âtre, puis je me suis dirigée vers la cuisine.
Comme le courant était revenu, j’ai mis l’eau à chauffer dans la bouilloire et allumé la radio sur la fréquence des informations locales :
« … et n’a fait aucune victime. Le département a subi néanmoins d’importants dégâts matériels suite à la monté des eaux… »
Rien de bien grave en conclusion. Certainement une ou deux chutes d’arbres et quelques tuiles envolées à déplorer. J’ai néanmoins décidé d’aller jeter un coup d’œil dehors pour voir si un tronc ne barrait pas la route, ce qui nous aurait bloqués ici encore quelques heures. Je suis passée dans l’entrée. Je percevais encore la voix de la présentatrice dans la cuisine attenante et, dans le fond, l’eau qui coulait dans la salle de bain. Mais ils me parvenaient comme à travers un brouillard, toute figée que j’étais.
« Le débordement de l’Oise a été particulièrement spectaculaire et a provoqué la fermeture des routes à partir de 21h30 hier soir… »
Mes clefs étaient sur la porte.
J’ai immédiatement reconnu la voix et j’ai pris une inspiration tremblante, le cœur battant à tout rompre. Dans le faisceau de la lampe, Benjamin avait lui-même reculé sous mon cri. Il avait levé les deux mains comme pour m’apaiser.
« Comment est-ce que tu es entré ? » ai-je demandé en reculant.
Je n’ai pas reconnu le ton de ma propre voix.
Benjamin a écarquillé les yeux. Puis il a fouillé dans ses poches pour en tirer un trousseau.
« Ta sœur m’a passé ses clefs. Elle se fait beaucoup de soucis pour toi, tu sais. »
Et à son air inquiet posé sur moi, j’ai deviné que du souci, il s’en faisait aussi.
Il faut dire qu’ainsi, dans le noir, la posture défiante, les doigts crispés sur ma torche et la respiration rauque, je devais avoir l’air d’une démente.
Benjamin a reposé sa main sur mon bras.
« Eh… Tout va bien ? »
Je n’ai pas répondu et j’ai laissé mon regard s’égarer de nouveau vers l’armoire.
Une bourrasque particulièrement violente a fait craquer les poutres et Benjamin a resserré sa prise sur moi. Sans doute la pénombre ambiante, la pluie battant les carreaux et le vent hurlant ne faisaient rien pour le rassurer.
« Viens, m’a-t-il pressé, descendons. Je vais allumer un feu dans la cheminée du salon. Ça nous fera de la lumière. »
Benjamin m’a entraînée à sa suite au-rez-de-chaussée, puis m’a fait m’asseoir dans le canapé du salon. Il a entassé quelques bûches dans la cheminée et tâché d’allumer un feu. Je le regardais machinalement faire, les yeux dans le vague, et je pensais toujours au chat, ce chat mort depuis des années.
« Je suis désolé pour ta grand-mère. »
Il attisait le feu dos à moi. J’ai soudain éprouvé une bouffée de culpabilité en songeant à ma sœur, que j’avais laissée seule et désemparée à l’hôpital. Je n’en revenais alors pas moi même de m’être laissé monter la tête ainsi.
« Qu’est-ce que tu faisais là haut ? » m’a alors demandé Benjamin d’une voix douce.
Je n’ai rien répondu. Benjamin a soupiré mais n’a pas insisté. Le feu bien pris, il s’est assis à côté de moi, a ramené un plaid sur nous et m’a attiré contre lui.
Et, alors - enfin -, des heures après le décès de ma grand mère, je me suis mise à pleurer.
Le soleil nous a réveillés au matin. Benjamin s’est dégagé précautionneusement, m’a embrassée sur le front et est parti se doucher. Je suis restée quelques instants à observer les braises mourantes dans l'âtre, puis je me suis dirigée vers la cuisine.
Comme le courant était revenu, j’ai mis l’eau à chauffer dans la bouilloire et allumé la radio sur la fréquence des informations locales :
« … et n’a fait aucune victime. Le département a subi néanmoins d’importants dégâts matériels suite à la monté des eaux… »
Rien de bien grave en conclusion. Certainement une ou deux chutes d’arbres et quelques tuiles envolées à déplorer. J’ai néanmoins décidé d’aller jeter un coup d’œil dehors pour voir si un tronc ne barrait pas la route, ce qui nous aurait bloqués ici encore quelques heures. Je suis passée dans l’entrée. Je percevais encore la voix de la présentatrice dans la cuisine attenante et, dans le fond, l’eau qui coulait dans la salle de bain. Mais ils me parvenaient comme à travers un brouillard, toute figée que j’étais.
« Le débordement de l’Oise a été particulièrement spectaculaire et a provoqué la fermeture des routes à partir de 21h30 hier soir… »
Mes clefs étaient sur la porte.
Texte de Calyspo
Quelqu’un peut m’expliquer la fin svp
RépondreSupprimerEt du coup elle sait ce que lui est arrive au chat quand il a disparut ?
RépondreSupprimerJe croit que c'est parce que Benjamin à réussi à entrée sans ouvrir la porte , celle ci étant fermé à clef , et les clef toujours dans la serrures ... mais c'est vrai que elle est pas très clair :c
RépondreSupprimerÀ mon avis c'est surtout qu'il ne s'agit pas de Benjamin. En effet il n'a pas pu ouvrir la porte avec un autre trousseau de clefs.. Mais surtout il n'a pas pu arriver à la maison, car les routes ont été bloquées dès 21h30! Je pense que c'est un esprit qui prend la forme des gens/animaux qu'elle connaît
RépondreSupprimerPersonne n'a pue venir, les routes etant fermé et les clef étant sur la porte empêchant d'autre clef.
RépondreSupprimerC'était très bien écrit et passionnant ! Même si j'ai été un peu perdue à a fin
RépondreSupprimerIl disparut puis là c'était "la chose" qui s'est transformé pour ressembler au chats et après à benjamin quand elle est dans la maison.
RépondreSupprimerOu mène le trou derrière la banquette?
RépondreSupprimerslt g pa li tro long
RépondreSupprimerFais comme chez toi alors.
SupprimerAvec ton lvl en français on comprend (vieille pute que je suis)
SupprimerBien dis Michel
SupprimerJe pense que Benjamin et le chat ont toujours été une seule et même chose.
RépondreSupprimerEh... Ce peut être ça aussi, carrément !
SupprimerBenjamin apparaît immédiatement après l'incident avec le chat...
SupprimerC'est fou comme une pasta sur deux me fait penser a Midnigthers...
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