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L'être personne

Je l'ai rencontré un jour ordinaire, lors de l'une de mes promenades en forêt. J'ai erré entre les arbres, me délectant des brindilles craquant sous mes bottes. Le ciel était bleu au-dessus du dôme de feuillages. Enveloppé dans cet univers paisible, je laissais mes pas me guider jusqu'à déboucher sur une petite clairière bordée d'une rivière. Quel joli paysage. Quelle lumière magique. Je me serais cru dans un conte de fées.

Il était là, recroquevillé sur lui-même. Petite masse nue et tremblante dans l'herbe. La scène était si étrange. Je me suis approché. Au fil de mes pas, mes mauvais yeux se sont mis à distinguer les cheveux blonds, les hématomes violacés sur le corps pâle, puis quand il a levé la tête, ses yeux bleus ont rencontré les miens. Il devait avoir une douzaine d'années environ.

Alors, c'est comme si j’émergeais d'un rêve. Qu'est-ce que cet enfant faisait ici, nu et blessé de surcroît ?

« Bonjour », a-t-il dit.

Je lui ai demandé comment il était arrivé là, si quelqu'un lui avait fait du mal, et surtout, son identité. Une lueur de peur est passée dans son regard. Sa bouche s'est ouverte, il semblait vouloir me répondre mais rien ne sortait. Il a pris une grande inspiration, puis m'a montré la rivière du doigt.

C'était comme si cette rivière était la réponse à mes trois interrogations. Au fond, rien me me semblait plus logique que de croire qu'il était réellement arrivé par la rivière.

Je lui ai tendu la main pour l'aider à se relever, et j'ai remarqué qu'en plus des hématomes, il avait comme de la peinture verte sur le corps, séchée et écaillée, créant ainsi des motifs semblables à des algues. Il ressemblait encore plus à une créature des eaux ainsi. Alors que la raison me soufflait qu'il s'agissait sans doute de pourriture d'une substance quelconque, l'apparition de l'enfant n'en était que plus mystique et poétique à mes yeux.

La raison m'a également poussé à vite l'embarquer dans ma voiture afin de l'amener à la police. Il devait être perdu et sa famille morte d'inquiétude. Je lui ai donné une couverture qui traînait dans le coffre afin qu'il s'enveloppe dedans.

« Bon alors, petit, comment tu t'appelles ? Moi c'est Georges.

- Je suis désolé, je ne souhaite pas être nommé. J'apprécie cependant que vous vous adressiez à moi.

- Tu t'exprimes bien pour un enfant de ton âge ! Bon ok, tu n'es pas obligé de me dire ton nom si tu n'en as pas envie, après tout je suis un inconnu. Je comprends que tu ne me fasses pas confiance. Je peux quand même te demander d'où tu viens ? J'imagine que ta famille te cherche partout.

- Je vous l'ai déjà dit. »

J'essayais de jouer le mec à l'aise pour le mettre en confiance, mais ce gamin m'inquiétait sérieusement, il devait être en état de choc malgré ce que semblait montrer son étonnante sérénité. Vu comme il restait évasif, il était évidemment hors de question de lui demander comment il s'était retrouvé dans cet état, cela l'aurait brusqué à coup sûr.

Il a fini par s'endormir. Je n'ai décidé de le réveiller que quand je me suis arrêté sur le parking du village, le plus proche du commissariat. Ne connaissant toujours pas son identité, je lui ai délicatement tapoté l'épaule.

« Désolé de te réveiller gamin, on est au commissariat. Tu peux leur parler sans crainte, ils vont te ramener chez toi. »

Il a ouvert des yeux tout ronds et a éclaté en sanglots, le souffle court. Il a hurlé qu'il ne parlerait à personne, et qu'il se tuerait à nouveau si on essayait de le forcer. Il avait donc essayé de se suicider ? J'ai tout de suite pensé qu'il devait fuir un foyer violent, ou quelque chose comme ça. Pour qu'il ait si peur d'être ramené chez lui, on avait dû lui faire subir des choses terribles.

Attendri et ne sachant que faire, je lui ai dit que s'il était d'accord, j'allais le ramener chez moi pour la nuit, et qu'il pourrait prendre un bain, manger et s'habiller. À ma grande surprise, il a accepté sans broncher. J'ai conduit jusqu'à ma maison, et l'ai invité à me suivre. Je l'ai fait entrer et lui ai fait couler un bain. Avant de partir cuisiner un bon repas, je lui ai laissé des habits propres sur une chaise. Ils étaient sans doute un peu justes pour lui, mais ce serait toujours mieux que sa tenue d’Adam.

À table, je n'ai pas osé dire un mot, bien qu'une fois habillé et décrassé, il ressemblait déjà plus à un être humain qu'au moment où je l'ai rencontré. Au bout de dix minutes à fixer ses pommes de terre en silence, c'est finalement lui qui a ouvert la bouche.

« Je vous remercie Georges mais je n'en mangerai pas. Je vous prie de ne pas être offensé par mon impolitesse.

- Pas de souci, si tu n'as pas faim, je ne vais pas te forcer, je veux simplement que tu te reposes autant que tu en as besoin.

- Votre maison est très jolie.

- J'imagine que tu ne voudras pas me dire comment est la tienne.

- Si j'en avais une, je serais heureux de vous la décrire, mais posséder mon propre logis réduirait mes chances d'être choisi. »

Pas de connerie cette fois, j'ai préféré ne pas lui demander de plus amples explications, même si ce qu'il me disait était déstabilisant. J'ai vite changé de sujet : le lendemain, c'était Pâques. Il m'a dit qu'il savait que c'était Pâques, et m'a ensuite demandé si j'avais prévu un python au déjeuner pour célébrer cette fête.

Je lui ai expliqué en rigolant, feignant toujours de ne pas trouver tout ceci inquiétant, que je n'avais pas connaissance de cette tradition et ne la suivais donc pas.

Peu après, il est allé se coucher dans la chambre d'enfant, et je n'ai pas tardé à rejoindre la mienne. Dans une autre vie me semblait-il, j'avais eu un fils. Voilà pourquoi je possédais des habits à sa taille et cette pièce, déverrouillée cette nuit après tant d'années. J'avais perdu ma femme bien avant encore, mais j'avais fini par accepter sa disparition, jamais élucidée. La mort de mon fils, par contre, survenue subitement à la suite d'une collision entre son vélo et une voiture roulant trop vite, était toujours aussi douloureuse. Je vivais donc seul avec mon chien, un basset. C'était sans doute la raison qui m'avait poussé à cet acte de charité.

Dès le lendemain, bien sûr, je le ramènerai au commissariat, expliquant qu'il avait sans doute besoin d'être placé en foyer d’accueil au vu des conditions dans lesquelles il semblait vivre. Je ne pouvais cependant nier que d'imaginer cette vie endormie dans la chambre de mon fils, c'était un peu comme s'il m'était rendu pour Pâques.

Je retournais ces pensées dans ma tête, quand j'ai entendu le chien hurler de douleur dans le jardin, là où il dormait la nuit. J'ai enfilé un pantalon en vitesse, me saisissant de mon téléphone, prêt à appeler la police. Ce devait être une intrusion.

J'ai ouvert violemment la porte, pour montrer que je ne me laissais pas intimider. Dans l'obscurité devenue silencieuse, mes yeux peinaient à distinguer quoi que ce soit. Soudain, appuyé à la palissade, je l'ai vu. Le garçon était penché sur le corps de mon chien, et arrachait des morceaux de chair avec ses mains, qu'il portait à sa bouche. Son pyjama était recouvert de sang, il mangeait comme un animal, une bête sauvage. Il ne semblait même pas remarquer ma présence.

Instinctivement, j'ai reculé de quelques pas.

Manœuvre visiblement inefficace, car il a réagi si vite que je n'ai même pas eu le temps de voir qu'il se jetait sur moi. Paniqué, j'ai laissé tomber mon téléphone dans l'herbe. L'enfant était enragé et essayait de me mordre, tandis que je me débattais, essayant de le repousser sans lui faire du mal. Tandis que nous roulions au sol, je trouvais le temps de constater qu'il avait une force phénoménale. Ses yeux auparavant si innocents semblaient briller d'une sinistre malice dans le noir.

Maintenant il essayait aussi de me griffer, et je devais agir vite si je ne voulais pas finir comme ma pauvre bête. Alors, que Dieu me pardonne, je lui ai envoyé un violent coup de pied dans l'estomac. Il a été projeté dans l'herbe, comme au ralenti. Pendant quelques secondes, il n'a pas bougé, les yeux clos.

Puis il s'est mis à marmonner des choses à toute vitesse. Je ne comprenais pas tout, mais il disait, la voix secouée de sanglots, qu'il n'aurait pas dû partir, et qu'à cause de lui, des terribles pénuries en tout genre allaient s’abattre sur eux. Il se tortillait par terre en hurlant, non pas de rage mais plutôt... Comme un caprice.

Je ne sais pas combien de temps cela a duré, peut-être dix minutes ou une heure, j'avais perdu toute notion du temps. D'un coup, il s'est relevé, a escaladé la palissade et est parti, sans un bruit. J'avais beau être un homme plutôt courageux, je n'étais pas complètement fou non plus. Je n'ai pas cherché à le rattraper. J'ai ramassé mon téléphone dans l'herbe, et ai appelé la police.

Ils sont arrivés peu après, et je leur ai tout raconté. Je n'ai pas souhaité porté plainte, cela n'aurait servi à rien et j'avais l'intuition qu'on ne le retrouverait pas. Pour être honnête, je commençais à douter de la nature humaine de mon protégé.

J'ai enterré mon fidèle ami canin, me retrouvant un peu plus seul encore. Les mois ont passé et j'ai fini par oublier cette histoire, ou du moins j'ai réussi à m'en détacher un peu. Pendant longtemps, je me repassais les événements dans ma tête, me demandant comment j'avais pu être assez stupide pour héberger un inconnu chez moi sans rien savoir de lui, peu importe son jeune âge.

Un jour pourtant, j'ai eu droit à la vérité. De l'autre côté de la rivière, se trouvait une communauté vivant recluse et pratiquant des rites assez particuliers, au nom d'un démon marin. Une enquête à leur sujet avait fini par révéler qu'ils étaient coupables de maltraitance envers les enfants élevés là-bas.

Dans les années 80, les fondateurs de cette communauté appelée Pythagore, avaient découvert une étrange substance verdâtre dans la rivière. Ils se l'appliquaient sur le corps et cela leur procurait des hallucinations qu'ils qualifiaient de contact avec le démon de la rivière, où celui-ci leur demandait régulièrement de lui remettre « celui dont le corps serait son ambassade terrestre ».

Rapidement, ils ont décidé d'élever les jeunes enfants dans cette optique-là, afin que l'un d'entre eux puisse être choisi par leur maître. Afin qu'ils soient de bons ambassadeurs dociles du démon, on ne leur donnait pas de nom, et leur empêchait de développer des goûts, un caractère, aucun objet ou vêtement ne leur appartenait. Il leur était défendu de développer leur humanité. Étant peu ou mal nourris et régulièrement battus ou abusés de diverses manières par les adultes, ils mouraient rapidement ou devenaient à leur tour bourreaux des nouvelles générations, attendant qu'un jour, l'un d'entre eux soit choisi. Afin qu'ils ne tentent de pas de se rebeller, on leur faisait également croire que des malédictions en tout genre s'abattraient sur la communauté par leur faute s'ils faisaient un pas de travers.

Là où je l'ai rencontré, dans la petite clairière, j'ai dressé une sépulture au nom que j'ai décidé de lui donner malgré tout.

Texte de Antinotice

1 commentaire:

  1. Un python au déjeuner mmmh !
    Sinon le démon marin
    C'est Cthulhu ?

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